Quelles sont les conditions pour qu’il y ait transfert des contrats de travail ?
L’article L.1224-1 du code du travail prévoit que « lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise ».
► A noter : les conditions posées par l’article L.1224-1 du code du travail ne sont pas limitatives. Le transfert automatique des contrats de travail s’impose également dans d’autres situations de modification de la situation juridique de l’entreprise dès lors que sont réunies deux conditions : l’existence d’une activité autonome et la poursuite de l’activité de cette entité économique.
Les contrats de travail sont ainsi transférés au nouvel employeur sans que ni ce dernier ni les salariés puissent s’y opposer. C’est ce que rappelle un arrêt du 4 avril 2006 en indiquant que « lorsque les conditions d’application de l’article L.122-12, alinéa 2 du code du travail sont réunies [devenu l’article L.1224-1] la poursuite du contrat de travail avec le cessionnaire s’opère de plein droit et s’impose tant aux employeurs successifs qu’aux salariés ». Or, les juges du fond avaient bien constaté que, « malgré des mises en demeure du nouveau concessionnaire, les salariés avaient refusé de se rendre à des entretiens destinés à préciser les conditions de la poursuite de leur contrat de travail ». L’employeur avait ainsi pu licencier les salariés pour faute grave pour abandon de poste.
A contrario, si les conditions de l’article L.1224-1 ne sont pas réunies, le salarié peut s’y opposer et son refus ne constitue pas une cause réelle et sérieuse de licenciement (arrêt du 19 décembre 2007).
Attention, cette solution n’est valable qu’à la condition que le contrat du travail des salariés transférés n’est pas modifié à l’occasion du transfert.
Si le contrat de travail est modifiéà l’occasion du transfert, l’employeur doit-il faire signer un avenant aux salariés transférés ?
Il convient de se demander, comme pour toute modification proposée par l’employeur s’il s’agit :
d’un changement dans les conditions de travail qui relève du pouvoir de direction de l’employeur et s’impose au salarié ;
ou d’une modification du contrat de travail qui nécessite l’accord du salarié.
Dans ce dernier cas, si le salarié refuse la modification de son contrat de travail proposée par l’employeur, ce dernier doit justifier, le cas échéant, le licenciement du salarié, en se fondant sur la cause initiale qui a motivé la modification du contrat de travail (cause personnelle ou économique).
► Attention, les juges veillent à ce que la modification du contrat de travail proposée ne présente pas un caractère frauduleux afin de faire échec à l’application de l’article L.1224-1 du code du travail. Ainsi, dans un arrêt du 28 septembre 2007, la Cour de cassation relève que « le jour même du transfert, le nouvel employeur avait proposé [au salarié] des modifications de son contrat de travail dont une modification de la rémunération selon des modalités qui n’étaient pas précisées, tout en lui indiquant qu’à défaut d’acceptation il serait licencié pour motif économique ». Les juges en déduisent « que le nouvel employeur avait tenté d’éluder les dispositions impératives de l’article L.122-12, alinéa 2 du code du travail [devenu L.1224-1] ».
Si la modification proposée constitue un changement dans les conditions de travail du salarié, l’accord du salarié n’est pas nécessaire. Toutefois, l’employeur qui sollicite l’accord du salarié ne peut plus ensuite prétendre qu’il s’agit d’un simple changement des conditions de travail (arrêt du 28 janvier 2004). Dans un autre arrêt du 9 mars 2011, la Cour de cassation indique également que « l’employeur qui avait, par une lettre qu’il présentait lui-même comme valant avenant au contrat de travail, demandé au salarié d’accepter ses nouvelles fonctions [avait nécessairement admis] que sa proposition modifiait le contrat de travail ».
L’employeur doit-il faire signer un avenant au contrat de travail si la modification du contrat découle d’un changement de convention collective nationale applicable ?
Non, précise la Cour de cassation dans un arrêt du 20 avril 2017. Dans cette affaire, le salarié était passé du statut cadre au statut d’agent de maîtrise à la suite du changement de CCN à l’occasion du transfert de son contrat de travail. La Cour de cassation estime que le salarié ne pouvait prétendre au maintien de sa classification car elle résultait, non pas de son contrat de travail, mais des dispositions conventionnelles applicables. L’application des anciennes dispositions conventionnelles prenaient donc fin à l’iissue du délai de survie de la convention mise en cause (généralement de 15 mois).